Ammar Bouhouche invité de la bibliothèque principale de Jijel : «La Révolution m’a permis d’être ce que je suis»
FODIL S.
EL WATAN
21 MARS 2021
La célébration de la Fête de la victoire a été mise à profit par la bibliothèque principale de la wilaya de Jijel pour inviter le moudjahid, universitaire et chercheur Amar Bouhouche qui a présenté, mercredi 17 mars, ses ouvrages notamment sa biographie D’Aziar dans les montagnes d’El Milia à l’université du Missouri à Columbia aux Etats-Unis, au niveau de l’annexe du musée Kotama de Jijel.
Du haut de ses 83 ans, toujours alerte et avec un sourire au coin des lèvres, le moudjahid, universitaire, chercheur et auteur arabophone et anglophone de notamment Le rôle de la bureaucratie dans les sociétés modernes (1982), Tendances modernes en consulting (1983), Guide du chercheur et méthode de rédaction de thèses (1990), Histoire politique de l’Algérie du début jusqu’à 1962 (1997), Histoire politique de l’Algérie de 1962 à nos jours (2015) et Témoin oculaire de la participation des étudiants dans la Révolution Algérienne (2018) est revenu sur son parcours depuis les premiers rudiments de l’apprentissage à Aziar avant de rallier l’école construite à El Milia par Mohamed Khattab, un grand mécène de la Révolution algérienne, qui est aussi derrière «l’entrée de Boussouf dans le monde du commerce après l’indépendance», témoignera le conférencier. Amar Bouhouche rejoindra par la suite l’Institut Ben Badis de Constantine.
Né en décembre 1938 à Aziar, relevant du douar Tamendjar, au sud d’El Ancer (wilaya de Jijel), d’où sont aussi originaires Cheikh Ahmed Hamani et Abou Laïd Doudou, le futur trésorier de l’Union générale des étudiants musulmans algériens (UGEMA) aux Etats-Unis, recherché, a fui dans un premier temps en France avant de rejoindre les rangs de l’ALN en Tunisie.
Bourse du FLN
En 1957, il bénéficiera d’une bourse du FLN dédiée aux moins de 20 ans pour leur permettre de poursuivre leurs études. Grâce au FLN, il se retrouve dans un premier temps lycéen au Koweït puis étudiant aux Etats-Unis où il activera avec d’autres compatriotes au sein de l’UGEMA pour être «un ambassadeur de la Révolution algérienne et non pas un étudiant», insistera-t-il. Il sera auréolé à la fin de son cursus universitaire d’un doctorat en sciences politiques. Aux Etats-Unis, il connaîtra Abdelkader Chanderli, Hocine Aït Ahmed et M’hamed Yazid.
Ils commenceront le travail de sensibilisation notamment auprès de Kennedy en soutenant que les Algériens ne combattent pas la France, mais les forces de l’OTAN. Il dira qu’ils ont pu contrer la propagande française qualifiant le FLN de ramassis de communistes, une accusation à laquelle pouvaient être sensibles les Américains et les convaincre qu’il ne s’agit que d’un mouvement indépendantiste. Il ajoutera que le voyage en Amérique de moudjahid blessé pour y être soigné a encore suscité encore plus de sympathie. Il parlera des négociations avec la France qui connaîtront leur grand virage avec la désignation de Louis Joxe comme ministre des Affaires algériennes en novembre 1960.
De retour en Algérie, Bouhouche se consacrera à l’enseignement, la recherche et l’écriture. «L’essentiel, nous avons pu arracher notre indépendance», se félicitera-t-il, et de louer cette Révolution qui lui a permis d’être ce qu’il est. Lors du débat qui a suivi sa conférence, Bouhouche défendra que les Algériens sont essentiellement berbères et que l’Islam les a arabisés, ajoutant que c’est le colonialisme qui a créé cette division faisant que le berbérophone est le vrai berbère alors que l’arabophone il est arrivé d’Arabie.
Il racontera aussi comment ils ont pu convaincre en 1974, Boumedienne d’organiser une – première et dernière – rencontre avec des intellectuels algériens au cours de laquelle le président s’est adressé en ces termes : «Je vous donne toute la liberté pour écrire comme vous l’entendez et sans aucun contrôle.» L’expérience tournera court, dira l’orateur, après l’intervention de Mahfoud Kaddache qui affirmera : «Je n’ai pas besoin de votre permission pour écrire.» Répondant à une question sur la facilitation de l’accès aux archives classées de plus de 50 ans France, il dira que c’est une réponse aux historiens français, qui ont une tradition, pour étudier leurs propres affaires.